Les vers de terre par Gérard ANGOUJARD
« La pollution de l’air est un tueur invisible et nous devons redoubler d’efforts pour nous attaquer à ses causes » a déclaré Hans Bruyninckx, le directeur exécutif de l’Agence européenne de l’environnement, lorsqu’il a pris connaissance du rapport annuel de son organisation le 29 octobre dernier. Les chiffres annoncés dans ce document font en effet froid dans le dos : sur notre continent, plus de 480 000 décès prématurés ont un lien direct avec la pollution atmosphérique. En cause : les transports routiers et les moteurs diésel, l’agriculture, l’industrie, la production d’énergie… Tant et si bien que les concentrations de particules fines, de dioxyde d’azote et d’ozone sont toujours audessus du niveau fixé par l’Union européenne et dépassent très largement les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. Une situation pas vraiment satisfaisante, d’autant plus qu’il convient d’y ajouter son corolaire obligé : des hausses de températures d’une régularité de métronome et ces phénomènes d’îlots de chaleur bien connus des citadins.
Un piège à CO2. S’attaquer à cette triste réalité ne sera pas simple et relève d’une volonté politique affirmée et sans concessions. En attendant que ce soit vraiment le cas (!), il existe malgré tout quelques « remèdes », pourtant vieux comme le monde, prêts à nous apporter leur concours. Parmi eux : le végétal et plus particulièrement les gazons, efficaces et entièrement naturels comme l’ont souligné les experts de l’Union française des semenciers dans l’un de leurs communiqués : « 10 000 m2 d’herbe peuvent capter le CO2 émis par une trentaine d’automobiles, mais aussi une partie des poussières et des saletés présentes dans l’air ambiant tandis que leurs racines fixent et améliorent la structure des sols. Ils participent également, en agissant comme un filtre naturel, à la dépollution des eaux de pluie ». Une « piste » bien entendu corroborée par les spécialistes de la Société française des gazons : « on estime que l’ensemble des pelouses présentes sur la planète emprisonnent annuellement environ 12 millions de tonnes de poussières et qu’elles en captent 5 fois plus qu’un sol nu ».
Un climatiseur naturel. Là ne s’arrêtent cependant pas les bienfaits des espaces engazonnés. Ils abaisseraient ainsi les températures au sol d’une dizaine de degrés par rapport à l’asphalte. Et selon l’environnementaliste écossais Howard Wood « environ 50 % de la chaleur du soleil qui arrive sur du gazon sont éliminés par évapotranspiration. Un mètre carré de pelouse libère ainsi 100 litres d’eau chaque année. L’impact de 100 m2 de gazon équivaut alors à 70 tonnes d’air conditionné ! ». De quoi rendre la vie des « urbains » un peu plus facile en période de canicule sachant que l’accumulation de chaleur par les bâtiments et les voies de circulation minéralisées empêche l’air ambiant de se refroidir durant la nuit. Des écarts allant jusqu’à 8° C ont ainsi été enregistrés par fortes chaleurs entre la ville et la campagne.
En quantité importante les turricules de vers de terre occasionnent des gênes dans l’entretien des gazons sportifs et détériorent la planéité, qualité requise pour les terrains sportifs engazonnés. Pour autant, les vers de terre ont un rôle prépondérant dans la vie du sol ; ils sont souvent surnommés les « Ingénieurs du sol ».
La bibliographie nous montre qu’il existe près de 110 espèces différentes de vers de terre en France qui sont réparties en trois grandes classes écologiques : les épigés, les endogés et les anéciques. En réalisant des galeries verticales dans le sol, ce sont les vers de terre de cette dernière classe écologique qui provoquent le plus de turricules en surface.
Pour avancer sur cette problématique, des études sont conduites depuis trois ans sur une cinquantaine de terrains pour mieux caractériser les espèces présentent dans les sols sportifs de l’ouest et mettre en corrélation les espèces présentes, les opérations mécaniques réalisées, la texture du sol et la production de turricules en surface.